lundi 10 juin 2013

Deuxième séance : la petite ville





























Le deuxième atelier a commencé par un flash-back : rendez-vous en 1913, année où Remy de Gourmont écrivit La Petite ville, texte assez court dans lequel il évoque les lieux de sa jeunesse - livre dont on peut lire gratuitement l'intégralité sur internet.
L'ouvrage est composé de chapitres thématiques qui évoquent généralement des lieux bien précis de la ville dont il est question (la gare, la cathédrale, le musée, le marché...) sans s'interdire de parler également du vent ou des coquelicots. Fait de souvenirs, le texte a pour particularité de ne jamais nommer la ville, ce que Remy de Gourmont reconnaît sans l'expliquer vraiment dans le passage suivant (in : Les petits sujets) : 

"Voici cinq ou six articulets sur un petit sujet qui n'intéresse guère les Parisiens, sur une petite ville que je ne veux même pas nommer, mais si je devais m'en excuser, ce serait pour dire que je n'aime à écrire que sur ce qui frappe directement mes yeux. J'ajouterais aussi qu'il ne doit pas y avoir pour l'écrivain, ni non plus pour le lecteur habitué à sa manière, de petits sujets. Les choses au milieu desquelles on vit et auxquelles on participe, prennent aussitôt une importance qui les rendrait presque dignes de l'histoire. Je passerais une saison dans le désert que je décrirais les choses du désert, même si ces choses n'étaient rien du tout. J'aimerais à raconter le néant. Mais je ne puis me persuader, philosophiquement, que là où je vis, puisse régner le néant. Les choses sont ce qu'un esprit les considère. Elles ont de l'importance, puisqu'elles l'occupent présentement, à l'exclusion du reste du monde. Il n'y a que les imbéciles, et tout de même je ne me range pas parmi eux, qui croient que les grands sujets font la grande littérature ou la grande peinture."

Sans cesse réduite par l'adjectif petite qui lui est accolée, la ville semble alors tenir dans la main. Comme si, au creux de la paume, on pouvait observer de tout près les éléments qui la composent, la réduisent peut-être - en proposent, en tout cas, une perception qui paraît complète, même s'il s'agit d'une illusion. Et cela est possible parce que, n'étant pas nommée, elle bascule dans la fiction.

J'ai donc demandé aux élèves d'établir collectivement une liste de tous les lieux qui leur paraissaient dignes d'intérêt (cinéma, piscine, centre commercial, patinoire, stade, marché, parc, métro, bords de Seine revinrent, selon les groupes). Puis de choisir, individuellement, cinq d'entre eux et de tenter de les décrire sans nommer la ville, en y associant un souvenir, une émotion, une sensation...
Il s'agissait ainsi de dessiner, par petites touches, un portrait de sa ville qui ne ressemblerait pas à un guide de voyage mais proposerait un ensemble subjectif, liant les uns aux autres des éléments choisis.

*

Note : les trois photos représentent : un arbre avec nid d'une cité de Montreuil ; les grilles qui entourent le stade de Tremblay ; une église d'Epinay.

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